Le Comité Exécutif de la Fédération Béninoise de Football (FBF) a récemment annoncé un changement majeur dans l’organisation du championnat national de football. Cette réforme opte pour une division en deux poules avec un total de 34 matchs par équipe pour le compte de la saison 2024-2025 du championnat béninois. Elle marque également la transition vers le retour d’un système à trois divisions (Ligue 1, Ligue 2, et Ligue 3), un modèle plus conventionnel et compréhensible pour les observateurs. Cependant, les avis divergent sur l’efficacité et l’impact de cette décision qui marque une phase de transition délicate pour le football béninois. Si certains y voient une avancée, d’autres sont plus prudents quant à la capacité du Bénin à gérer un championnat à cette échelle (18 clubs dans l’élite). Réforme audacieuse ou pari risqué ?
Un retour tant attendu mais des défis colossaux
Pour Aliou Toundé, journaliste et commentateur sportif de Deeman TV qui diffuse en direct plusieurs matchs du championnat béninois, le retour au format de trois divisions est une bonne chose. « C’est une bonne décision de tendre vers un système avec la Ligue 1, 2 et 3. Ce type de format est plus connu et surtout facile à comprendre pour tout le monde. L’idée est très bonne », déclare-t-il. Toutefois, sur le format de la saison de transition, il pointe un problème logistique important lié à la répartition géographique des clubs dans les deux poules. Les conséquences pour les équipes en termes de logistique n’ont peut-être pas été suffisamment anticipées, semble-t-il indiqué.
Les équipes de la poule A doivent parcourir des distances beaucoup plus longues que celles de la poule B. Il a clairement fait remarquer que cette différence. Ce qui pourrait affecter les performances des clubs en raison de la fatigue et des coûts de déplacement. Inquiétude légitime. Selon lui, « on aurait dû garder les quatre poules et expliquer que cette saison est une transition vers ce nouveau système. Le fait de passer à deux poules pénalise certaines équipes du championnat béninois. Notamment, celles de la poule A, qui doivent parcourir plus de kilomètres que celles de la poule B. Par exemple, Loto-Popo FC doit se déplacer de Grand-Popo à Banikoara soit plus de 700 km et vice-versa. Alors que les distances dans la poule B sont beaucoup plus courtes, environ 200 km maximum. Espérons que tout se passe bien pour cette saison de transition », a analysé Aliou Toundé.
Une transition courageuse vers la stabilité
De son côté, Sosthène Seflimi, directeur général de Coton Sport Bénin dont le club est trois fois vainqueur du championnat béninois, voit cette transition sous un angle plus positif. Il met l’accent sur l’évolution progressive du football béninois sous l’impulsion du Chef de l’État, Patrice Talon et du Président de la FBF, Mathurin de Chacus. « La professionnalisation du Sport et du football dans le cas d’espèce ne se décrète pas. C’est un long processus qui requiert de la patience. L’organisation du championnat national qui est le baromètre a été beaucoup améliorée avec l’avènement au pouvoir du Président Patrice Talon et l’élection du président Mathurin de Chacus à la tête de la Fédération. Les infrastructures ont été construites par le gouvernement et mises à la disposition des clubs et le championnat national est mieux encadré. Le format à 36 clubs qui a été longtemps décrié était un passage obligé. Les crises perlées qui ont secoué le Comité exécutif de la Fédération Béninoise de Football ne sont pas que de lointains souvenirs. Il a fallu ménager tous les acteurs pendant plusieurs années », affirme-t-il, soulignant également donc le rôle essentiel des infrastructures construites par le gouvernement.
Pour l’ancien journaliste sportif, précédemment Directeur Général Délégué de la Société sportive Adjidja Football Club Sarl, cette première phase était nécessaire pour stabiliser le système afin d’avoir une meilleure compétitivité et un football professionnel plus viable. Aujourd’hui, avec la décision de réduire le nombre de clubs en Ligue 1 à 18, il estime que le football béninois entre dans une phase décisive. « C’était le prix à payer pour s’assurer de la stabilité du système. Le moment est venu de passer à l’opération cruciale. Ramener le nombre de clubs participants de l’élite à 18. C’est une décision très courageuse qui est certainement applaudie par tous les observateurs, mais surtout par le public sportif », a lâché Sosthène Seflimi, directeur général de Coton Sport Bénin.
Des doutes sur la viabilité du championnat béninois
Ambroise Zinsou est journaliste sportif à VISA Info. Il cumule plusieurs années d’expérience dans le métier et est l’une des grandes voix critiques dans le milieu du sport béninois. Malgré les points positifs qu’il soulève, l’ancien du quotidien Fraternité, reste sceptique quant à l’avenir.
D’abord, selon lui, le format à 36 clubs, répartis en neuf zones, a créé une compétition inédite de faible qualité. « C’est un format qui n’a pas encouragé la concurrence et, comme j’ai toujours l’habitude de le dire, qui a fait le lit à la médiocrité. Inédit de voir 36 clubs évoluer dans l’élite du football. Seul au Bénin, on a vu ça. C’est vrai que ce n’est pas le Bénin qui a inventé le football. Mais, on a eu droit à ce format inédit-là ».
Ensuite, si la réforme qu’il juge bonne vise à passer à un championnat béninois linéaire de 18 clubs en Ligue 1 à l’issue de la saison de transition, Ambroise Zinsou reste sceptique sur sa mise en œuvre. Il estime que les moyens, notamment financiers, pour maintenir une telle compétition sont encore insuffisants. « C’est vrai, c’est une bonne chose pour qu’on puisse aller au format linéaire. Mais moi, j’ai beaucoup de doutes ou bien, je suis un peu sceptique par rapport à ce format-là. Vous n’êtes pas sans savoir que nous n’avons pas encore les moyens pour maintenir un championnat de 18 clubs. C’est réel, les acteurs, ils sont dans des calculs parce qu’on se dit quand on va dire neuf, peut-être, je vais me retrouver dedans et autres. Je trouve que ce n’est pas mauvais, mais on n’a toujours pas les moyens, quand je dis les moyens, c’est l’organisation, ce sont les moyens financiers. On n’a pas ça pour tenir. Ils vont commencer, on va voir ».
Enfin, selon Ambroise Zinsou, il aurait été plus judicieux de maintenir les quatre zones et de repêcher les quatre premiers pour constituer un championnat linéaire avec 16 équipes en Ligue 1, 18 en Ligue 2, et le reste en Ligue 3. Cette proposition serait conforme aux recommandations de la FIFA, qui fixe des quotas clairs pour chaque division. Toutefois, il admet que la formule actuelle offre une opportunité aux clubs de démontrer leur potentiel sur le terrain, bien que ses doutes persistent sur l’aboutissement réel de cette nouvelle structure. « Sinon, la FIFA a été claire. C’est 16 équipes en D1, 18 en D2 et 20 en D3. Mais, c’est déjà bien qu’on puisse passer de l’autre format au format linéaire avec 18 clubs. Je trouve que cette possibilité offre aux clubs maintenant de se maintenir, c’est-à-dire les neuf premiers de chaque poule, va se démontrer sur le terrain. Sur le terrain, on verra et à l’issue de ce championnat, on saura qui sont les clubs qui vont évoluer en D1, en D2 et en D3. En un mot, je pense que le format pour revenir au championnat linéaire, la formule trouvée par les acteurs du football, n’est pas totalement satisfaisante. Mais, comme c’est eux-mêmes qui ont décidé, ils ont décidé d’emprunter cette voie. On va aller suivre pour voir ce que ça va donner », a conclu le journaliste sportif.
Evrard Fulgérale
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